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BERTRAND TAVERNIER

Publié le

BERTRAND TAVERNIER

Naissance : 25/04/1941 à Lyon (France)

Nationalité : Français

Fils de l’écrivain et résistant René Tavernier, lequel abrita clandestinement durant la guerre Louis Aragon et sa femme Elsa Triolet. Bertrand Tavernier déclarera plus tard que le plus beau poême écrit par Aragon le fut pour sa mère. C’est également Aragon, qui permettra à Bertrand, à l’âge de 24 ans, d’écrire son premier article, à savoir une critique du film de Jean-Luc Godard, “Pierrot le fou”.

Il devient journaliste, collaborant à plusieurs revues de cinéma, dont “Les cahiers du cinéma”, magazine dont il prendra ses distances, n’étant pas du tout sur la même longueur d’onde que François Truffaut. Tavernier, par exemple, vénère les grands scénaristes et dialoguistes des années 50, comme Pierre Bost ou Jean Aurenche, ceux-là même que Truffaut ne cesse de dénigrer. Lorsque Tavernier les engagera pour ses premiers films, la rupture d’avec la Nouvelle-Vague sera consommée.

Dans les années 60, il publie un certain nombre d’entretiens avec de grands metteurs en scène américains comme John Ford ou Raoul Walsh, mais il fera connaître en France d’autres noms moins connus, mais intéressants, comme Delmer Daves, André De Toth ou Budd Boetticher.

Parallèlement, il devient assistant-réalisateur de Jean-Pierre Melville sur “Léon Morin, prètre”. Il partage avec Melville un point commun, leur amour du cinéma noir américain et du western. Tavernier est d’ailleurs à ce sujet un peu paradoxal, d’un côté sa passion pour le cinéma américain, et de l’autre un combat de longue haleine pour la défense du cinéma français.

En 1970, il écrit avec l’écrivain Jean-Pierre Coursodon, le livre “30 ans de cinéma américain”, considéré aujourd’hui encore, comme la bible en la matière. D’ailleurs ce livre sera réédité en 1991 sous le titre de “50 ans de cinéma américain” et Tavernier nous promet bientôt une troisième édition qui s’appellera, comme il se doit, “70 ans de cinéma américain”.

Il sera également attaché de presse, et en 1974, il est à Cannes pour défendre “La grande bouffe”, dont la projection causera l’un des plus grands scandales de l’histoire de ce festival, l’équipe du film manquant de peu de se faire lyncher sur les marches du palais, par une foule hystérique. Philippe Noiret fait partie de la distribution et se lie d’amitié avec Tavernier, qui fera de lui son acteur fétiche.

C’est la même année qu’il débute dans la mise en scène, avec l’adaptation d’un roman de Georges Simenon “L’horloger d’Everton”, que Tavernier transposera dans sa ville natale de Lyon, devenant “L’horloger de Saint-Paul”. Philippe Noiret en est la vedette, dans le rôle d’un honnête horloger sans histoires, dont la vie bascule le jour où il apprend que son fils a tué un homme et qu’il est recherché par la police, emmenée par Jean Rochefort. L’horloger va alors se pencher sur la vie de son fils, pour s’apercevoir qu’il ne le connaît finalement que très peu, et lorsque celui-ci sera arrêté , le père décidera de le soutenir sans réserves. Le film obtient de très bonnes critiques, totalement justifiées, et recevra le prix Louis Delluc, ainsi que le Grand Prix au festival de Berlin.

L’année suivante, il se lance dans le film en costume, avec “Que la fète commence”, où il retrouve Philippe Noiret, Jean Rochefort et Christine Pascal, présente elle aussi dans le premier film, auquel il ajoute Jean-Pierre Marielle et Marina Vlady. Ce film relate l’époque, peu connue, du Régent qui se distinguait par de grandes fètes qui finissaient généralement en orgies sexuelles. Un film audacieux, qui sera le grand triomphateur des Césars, Tavernier obtenant celui du meilleur réalisateur et Jean Rochefort, grandiose en abbé amoral et fourbe, celui du second rôle masculin.

En 1976, c’est “Le juge et l’assassin”, qui révèle les talents dramatiques de Michel Galabru, totalement à contre-emploi dans le rôle, réel, d’un ancien soldat ayant survécu à une tentative de suicide par balle, ayant gardé cette dernière dans le crâne et qui sillonera la France, violant et égorgant des bergères. En juge carriériste et opportuniste à souhait, Philippe Noiret se montre dans le film plus amoral et méprisable que l’assassin fou.

Retour à l’époque contemporaine, avec “Des enfants gâtés”, coécrit par Christine Pascal, où un scénariste de cinéma, joué par Michel Piccoli, loue un studio dans un immeuble prolétaire pour travailler au calme. Mais il sera embarqué par un comité de locataires, désireux de faire valoir leurs droits vis-à-vis des propriétaires véreux. Malgré d’évidentes qualités, ce film connaîtra un succès moindre.

En 1980, il tente une incursion réussie dans la science-fiction, genre pourtant peu prisé par le cinéma français. Ce sera "La mort en direct". Romy Schneider y joue une jeune femme condamnée par un cancer, qui accepte d’ètre filmée en permanence par un homme, joué par Harvey Keitel, dont les yeux ont été transformés en caméra. Une critique de la dérive de la télévision, qui fut considérée comme exagérée à l’époque, mais qui prend tout son sens aujourd’hui à l’heure des télés-réalités. Il y a quelques années, une jeune Anglaise a d’ailleurs été filmée dans sa longue agonie, démontrant que Tavernier était plus un visionnaire qu’un affabulateur.

Il retourne à Lyon, pour “Une semaine de vacances”, avec Nathalie Baye, Gérard Lanvin et Michel Galabru. L’histoire d’une jeune prof, qui un jour comme les autres, n’en peut plus et décide de faire un break. Difficile de faire un film sur la dépression sans y plonger le spectateur, mais Tavernier réussi l’exploit de l’éviter. On notera, l’apparition de Philippe Noiret, qui reprend son rôle de l’horloger, pour une courte séquence. Le même Noiret qui rerouvera Tavernier l’année suivante en Afrique, pour l’un de ses meilleurs films : “Coup de torchon”.

A la base de “Coup de torchon”, on retrouve le roman “1275 âmes”, écrit par l’un des maîtres de la Série Noire, Jim Thompson. Mais si le roman se situait dans le sud des Etats-Unis, sur fond de ségrégation raciale, le film transpose le récit en Afrique au temps de la colonisation, ce qui permet à Tavernier d’en faire une critique acerbe. Noiret, prodigieux, y joue le policier d’une petite ville. Loin d’être un héros, c’est un être lâche, paresseux et corrompu qui de son propre aveu n’arrête jamais personne et qui se fait ridiculiser en permanence par les maquereaux du coin, ainsi que par sa femme, qui non contente de lui refuser le devoir conjugal, est parvenue à imposer sous leur toit son amant, qu’elle fait passer pour son frère. Jusqu’au jour, où il se métamorphose en une sorte de justicier, se croyant investi d’une mission divine, et qui tuera un à un ceux qui la veille encore le faisait tourner en ridicule, sombrant dans une folie meurtrière aussi excessive que ne l’était sa soumission. Le casting est de haut niveau, car outre Noiret, on y retrouve Isabelle Huppert en nympho crédule, Stéphane Audran en épouse acariâtre et méprisante, Jean-Pierre Marielle dans un double rôle, Guy Marchand en beauf raciste et vantard, et Eddy Mitchell, qui signe ici ses vrais débuts à l’écran et qui est parfait en soi-disant beau-frère totalement demeuré.

Il connaît un autre joli succès en 1984, avec “Un dimanche à la campagne”, réunion de famille sous fond de nostalgie où il offre au grand acteur de théatre Louis Ducreux son quasi unique film au cinéma. Pour ce film, il obtient le prix de la mise en scène à Cannes.

En 1986, il réalise un de ses films les plus personnels, “Autour de minuit”, qui lui permet de rendre hommage à son genre de musique préféré, le jazz, magnifié par la présence du grand jazzman Dexter Gordon. Un film qui triomphera en Amérique, recevant l’Oscar du meilleur film étranger ainsi qu’un Golden Globe. L’année suivante, il se lance dans un projet audacieux avec “La passion Béatrice”, film violent se déroulant au Moyen-Age, époque peu filmée au cinéma, avec Julie Delpy et Bernard-Pierre Donnadieu avec qui Tavernier aura des relations difficiles et la pauvre Delpy, des relations excécrables. Le film déroute et ne rencontre pas son public. Il retrouve Philippe Noiret et le succès en 1989, avec le très beau “La vie et rien d’autre”, charge antimilitariste dans laquelle une jeune femme, jouée par Sabine Azéma, recherche son mari porté disparu, à l’issue de la première guerre.

En 1990, il tourne “Daddy nostalgie”, écrit par sa femme Colo, et qui évoque les relations entre un père mourant et sa fille. La présence des comédiens anglais Dirk Bogarde et Jane Birkin amène Tavernier à tourner quasi tout le film en Anglais, qui est précisément la nationalité de sa femme, pour qui l’histoire est autobiographique.

En 1992, il tente de relancer un genre moribond en France, le polar. Ce sera le superbe “L.627”, film quasi documentaire sur le quotidien, souvent sordide, d’une brigade des stups. Un grand film en colère, où le réalisateur, avec l’aide de l’ancien commissaire Michel Alexandre au scénario, dénonce le manque de moyens dont la police dispose pour être efficace, et le fait que les politiques privilégient les statistiques bidons par rapport au vrai travail sur le terrain. Pour ce film, il décide de ne pas engager de vedettes, mais de solides acteurs plus vrais que nature, et qui ont d’ailleurs suivi une formation poussée pour être des flics crédibles. On retrouve l’excellent acteur de théatre Didier Bezace, entouré de Jean-Paul Comart, Charlotte Kady ou encore Jean-Roger Milo. On notera la présence du débutant Philippe Torreton et de Nils Tavernier, fils du metteur-en-scène. Une grande réussite assurément.

En 1994, il revient au film en costume avec l’étonnant “La fille de D’Artagnan”, avec Sophie Marceau. Un film qui devait ètre réalisé par Riccardo Freda, mais, malade, il avait dû renoncer et Tavernier reprit le flambeau. Un film qui démystifie le mythe des Mousquetaires, décrits ici comme des vieillards quasi séniles. Dans le rôle de D’Artagnan, Philippe Noiret joue ici pour la 7è et dernière fois sous la direction de Tavernier.

L’année suivante, il revient en force avec “L’appât”, inspiré d’une affaire criminelle ayant défrayée la chronique en France. Deux garçons et une fille volent et assassinent des hommes figurant sur le carnet d’adresses de la fille. Celle-ci servant d’appât. Marie Gillain, Olivier Sitruk et Bruno Putzulu en tiennent les rôles principaux avec énormémént de naturel. Un film qui décrit une jeunesse en manque total de repères, totalement matérialisé par la télévision et le souci de l’argent facile. Une belle réussite.

Ce qui est aussi le cas du suivant, “Capitaine Conan”, se situant une fois encore au coeur de la première guerre mondiale, Vu dans “L.627”, Philippe Torreton explose littéralement dans le rôle d’un parfait soldat, parfaitement programmé pour tuer, perdant au passage toute forme d’humanité, aux ordres d’officiers supérieurs décrits commes des vieilles badernes grotesques. Bertrand Tavernier recevra le césar du meilleur réalisateur, alors que Torreton reçoit celui de meilleur acteur.

Philippe Torreton sera trois ans plus tard la vedette de “Ca commence aujourd’hui”, encore un film en colère qui dénonce le dur combat d’un professeur de lycée dans une banlieue défavorisée.

En 2002, sort “Laissez-passer”, qui retrace l’histoire du cinéma français durant l’occupation, à travers le parcours de deux scénaristes, l’un acceptant de travailler pour la compagnie allemande de films “Continental”, l’autre s’y refusant obstinément. En 2004, “Holy Lola” nous montre un couple Français, joué par Jacques Gamblin et Isabelle Carré, qui partent au Cambodge afin d’y adopter un bébé et qui subiront un vrai parcours du combattant.

Après une éclipse, Tavernier réalise un rêve : tourner un film aux Etats-Unis. Il embarque ainsi Tommy Lee Jones dans le Bayou de la Louisianne, pour une adaptation d’un roman de James Lee Burke, “Dans la brume électrique”. Ce dernier y joue un flic, alcoolique repenti, qui se retrouvera amener à enquèter sur un vieux meurtre,

Il revient en France l’année suivante pour un nouveau film à costumes, “La princesse de Montpensier”, qui ne déplacera pas les foules. On l’attend désormais dans son prochain film qui devrait sortir cette année encore, et intitulé “Quai d’Orsay” dont les vedettes seront Niels Arestrup et Thierry Lhermitte.

Président de l’Institut Lumière à Lyon, il est également producteur, via sa société de production “Little Bear”

En février 2012, il a présidé la 2è édition des Magritte, équivalent belge des Césars.

Père de l’acteur et réalisateur Nils Tavernier, il est aussi le papa de la romancière Tiffany Tavernier.

FILMOGRAPHIE

1974 L’HORLOGER DE SAINT-PAUL

1975 QUE LA FETE COMMENCE

1976 LE JUGE ET L’ASSASSIN

1977 DES ENFANTS GATES

1980 LA MORT EN DIRECT

1981 UNE SEMAINE DE VACANCES

1982 COUP DE TORCHON

1984 UN DIMANCHE A LA CAMPAGNE

1986 AUTOUR DE MINUIT

1987 LA PASSION BEATRICE

1989 LA VIE ET RIEN D’AUTRE

1990 DADDY NOSTALGIE

1992 L.627

1994 LA FILLE DE D’ARTAGNAN

1995 L’APPAT

1996 CAPITAINE CONAN

1999 CA COMMENCE AUJOURD’HUI

2002 LAISSEZ-PASSER

2004 HOLY LOLA

2009 DANS LA BRUME ELECTRIQUE

2010 LA PRINCESSE DE MONTPENSIER

2013 QUAI D’ORSAY

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